Yousra Bustros Chedid
J’ai regardé avec intérêt hier soir la vidéo de trois minutes que vous avez adressée aux Libanais. Une vidéo que votre bureau de presse n’a même pas pris la peine de sous-titrer en arabe, langue maternelle de mon pays. En fait Monsieur Netanyahou votre vidéo ne nous était pas adressée. C’est aux Occidentaux que vous parliez pour leur montrer combien votre pays est soucieux du bien-être des Libanais et combien Tsahal dans ses agissements est une armée plus que morale. En bref, une cynique opération de communication afin de convaincre les quelques opinions publiques qui vous sont encore favorables, de la justesse de votre cause.
A l’heure où j’écris ces lignes une chaîne de télévision libanaise passe les images d’un village de la Bekaa que votre aviation a lourdement bombardé cette nuit. Aux côtés des décombres, on voit des couches-culottes, des jouets, une trousse de toilette, en bref tout ces objets qui font partie du quotidien de personnes ordinaires qu’elles soient musulmannes, juives où chrétiennes.
Si vous pouvez flouer certains en leur disant que dans toutes les cuisines des Emm Ali se trouvent des missiles balistiques et que la mitraillette en plastique de petit Ali est une vraie AK 47 qui attaquerera bientôt un arrêt de bus à Tel Aviv, vous ne pouvez pas convaincre tout le monde. Et cela ne justifie en aucun cas de tuer des innocents. Dans votre lancée, vous nous raconterez bientôt que le minaret de la mosquée ou le clocher de l’église sont des rampes de lancements. Ou que les colonnes millénaires des Temples de Baalbeck des missiles camouflés.
Voyez-vous Monsieur Netanyahou vous êtes pour moi une insulte à beaucoup de choses qui me sont chères. Entre autres, une insulte au monde civilisé, ce monde libre que vous prétendez défendre et dont les dirigeants aujourd’hui sont plus de lâches Chamberlain que de courageux Churchill. Si massacrer des innocents qui ont eu pour seul tort de naître et d’exister au mauvais endroit, si déplacer des populations entières dans des conditions inhumaines est votre contribution à la défense de la civilisation, il faut alors souhaiter au plus vite un météorite qui raserait ce monde qui a perdu tous ses repères. Et laisser notre planète au monde animal qui est sûrement moins bestial que notre race.
On vous reproche de mentir. Mais quel homme politique ne ment pas. Il faut donc préciser la nature de vos mensonges. A force de renier vos engagements, vous n’êtes pas un allié fiable et encore moins un ennemi honorable. Vous êtes de ceux qui tirent dans le dos sans aucun scrupule.
Vous prétendez combattre le fondamentalisme musulman quand Israël sous votre gouvernance est devenu le porte-étendard du fondamentalisme juif dans toute son abjection dont celle de vos illuminés qui n’hésitent pas dans leurs vexations quotidiennes à l’encontre des Palestiniens à pousser l’horreur jusqu’à faire avaler de l’essence à un adolescent de 14 ans pour le brûler vif ensuite.
A force de vouloir déshumaniser vos “ennemis” pour mieux justifier vos massacres, c’est vous-mêmes ainsi que votre pays qui avez perdu votre âme qui est l’essence-même de votre humanité.
Je vous écris et dehors dans mon jardin à la Békaa raisonne le bruit d’un chantier que nous avons débuté hier. Pendant que vous nous bombardez et détruisez nos villages, nous continuons de bâtir, même après des nuits sans sommeil.
C’est ça le miracle Libanais, un miracle qui attise votre rancœur. Le miracle libanais c’est aussi la bienveillance et la générosité de mes compatriotes qui accueillent et aident à subvenir aux besoins du million de Libanais que vous avez déplacé et jeté dans la précarité. A vos plans de divisions, nous avons opposé notre union sacrée malgré tous nos différends qui sont, sans faux-semblants, profonds.
Vous pouvez tout détruire, vous pouvez également nous tuer mais vous ne pourrez jamais tuer ce que nous sommes mais aussi ce que nous avons pour bagage depuis des millénaires, ce formidable ADN Libanais transmis de génération en génération et qui tient plus du miracle que de la science.
Malgré toutes nos failles et nos défauts, nous Libanais sommes un miracle pour notre pays et vous, malgré l’image que vous cherchez à offrir, une malédiction pour le vôtre. Tant que vous musellerez ou tuerez tous vos faiseurs de paix, Israël est condamné à la guerre perpétuelle jusqu’au jour où l’Alya se fera à une vitesse accélérée dans l’autre sens et que la démographie aura raison de vous.
Plus vous persisterez dans votre violence et plus la paix entre nos peuples sera inatteignable. Moi qui souhaitais un jour vivre enfin dans un Proche-Orient pacifié n’ai plus qu’un seul souhait: que vous nous foutiez la paix. Et assister de loin à la destruction de ce pays voisin né d’une terrible injustice que certains de vos fils, pas encore assez nombreux, essayent de réparer. Mais tant que vous et vos semblables serez au pouvoir, votre pays ne connaîtra que désolation et votre insupportable arrogance précipitera sa fin. Ceci ne prétend pas être une prophétie, mais le simple constat de quelqu’un qui connaît bien son histoire.
Je ne sais pas si cette lettre vous parviendra un jour. Au train apocalyptique où va votre démence, il y a bien plus de chances que le Messie, le Mahdi ou le Christ revenu sur terre ne la lisent.
Une citoyenne libanaise.