Un département de l’Action féminine au Hezbollah : que cache cette soudaine mise en valeur ?

Un département de l’Action féminine au Hezbollah : que cache cette soudaine mise en valeur ?

L’OLJ / Par Scarlett HADDAD, à

C’est la première fois que le Hezbollah cherche à mettre en valeur le rôle de la femme. Certes, les femmes sont très présentes dans de nombreux secteurs d’activité, mais c’est la première fois que le secrétaire général du parti évoque leur place au sein de celui-ci. Naïm Kassem a choisi de prononcer son discours samedi en présence de toutes les institutions féminines qui font partie du Hezbollah et qui regroupent, selon la formation, plus de 22 000 femmes. Il a d’ailleurs annoncé, à cette occasion, la naissance officielle du département de l’Action féminine qui, selon lui, jouera un rôle déterminant.

Le patron du Hezbollah s’est exprimé lors d’un événement placé sous le symbole du « Rassemblement fatimide » (en référence à Fatima, fille de Mahomet). Il y a donc évoqué pour la première fois ce qu’il considère être l’importance du rôle de la femme au sein de sa formation, non seulement au niveau des familles de ses partisans et de l’éducation des enfants, mais aussi dans les domaines de la santé, du soutien aux blessés, de l’aide psychologique, de l’assistance sociale, de la gestion de la vie au quotidien et surtout sur le plan de « l’enseignement des valeurs partisanes ».

Pourquoi ce soudain souci de la part de la direction du Hezb de mettre en avant le rôle des femmes ? Plusieurs raisons peuvent expliquer ce choix. D’abord, il est sûr que cette initiative intervient à un moment crucial pour le Hezbollah où il se sent attaqué de toutes parts et où il considère qu’on cherche à l’isoler, sous prétexte qu’il appartient à une autre époque, celle où la femme était marginalisée et où la place prépondérante était réservée aux hommes. C’est pourquoi un des objectifs de cette démarche vise à montrer que, contrairement à l’image qu’a de lui le monde extérieur, le Hezbollah se veut conscient de l’importance du rôle de la femme. De plus, le parti semble craindre que ses partisanes, qui ont subi de lourdes pertes, ne s’en détachent. La direction de la formation a donc voulu rendre un hommage aux femmes. Selon les milieux de la formation, il s’agit, en quelque sorte, d’une tentative de « leur rendre justice ». De plus, dans l’exposé des différentes facettes de son rôle, lors du rassemblement de samedi, le Hezbollah a pris soin de parler des arts, de la reconstruction, de la médecine et d’autres domaines qui sont rarement associés aux femmes ou simplement mentionnés dans l’univers du Hezbollah.

Dans les milieux du parti, on avance l’idée que la « résistance » peut revêtir plusieurs autres formes que l’aspect militaire. Elle est ainsi dans la pensée, l’éducation, la politique, l’attachement à la terre. Et ces notions peuvent être mieux véhiculées par les femmes, selon les vues du Hezbollah. D’autant que certains parlent d’un début de mutation de la formation, dans le sens de l’affaiblissement de son rôle militaire (en dépit des déclarations belliqueuses) au profit du rôle social. Par crainte d’être abandonné par les jeunes, le Hezbollah se tourne vers les femmes – et l’influence qu’elles exercent sur les générations à venir – pour se consolider.

En attendant que cette tendance se clarifie, le Hezbollah a probablement voulu aussi montrer qu’il n’est pas seulement une formation militaire. Même si sa branche armée peut actuellement être en suspens, toutes les autres poursuivent leurs activités. Le message qu’il souhaiterait donc envoyer se résume ainsi : il sera très difficile de l’éliminer auprès de sa base populaire, qui constitue son principal atout. On peut donc tuer ses combattants mais on ne tuera pas « l’esprit de combat », selon ses propres termes, tant qu’il y aura des femmes qui l’inculqueront aux jeunes générations.